Le gouvernement cherche à imposer un modèle d’école qui vise à faire sortir les élèves de l’École publique, le plus tôt possible et à chaque étape de leur scolarité. En érigeant l’uniforme, les groupes de niveau et le SNU au rang de priorités politiques et budgétaires, le gouvernement fait un choix clair, celui d’une école du tri social, d’une école passéiste et conservatrice. En supprimant des postes et en refusant de donner à l’école publique les moyens nécessaires pour fonctionner, le gouvernement fait le choix de l’austérité et de l’inégalité de traitement, comme l’a mis en lumière l’affaire Stanislas, avec de nombreux passe-droit pour une certaine caste de privilégiés.

Cette dégradation du service public d’éducation ne relève pas seulement  d’une politique budgétaire, qui ferait des économies sur l’éducation, il s’agit bien de réduire le service public à un service minimal, réservé aux familles qui n’ont pas d’autre choix, afin de développer parallèlement le marché de l’éducation (enseignement privé, cours particuliers, loisirs éducatifs…) et  les  politiques locales (à  l’échelle des  collectivités  ou des établissements, dans le cadre de projets territoriaux, de « cités éducatives » ou de projets d’établissement, voire d’expérimentations). À l’arrivée, une éducation de moins en moins commune, de plus en plus différenciée en fonction des moyens de la famille et des collectivités locales, des établissements fréquentés et des capacités à s’orienter dans un système opaque et confus, c’est-à-dire de plus en plus inégalitaire.

Ces politiques mettent en place  un véritable  séparatisme   scolaire. En privant   les   citoyennes   et  les  citoyens   de demain d’une culture partagée, il constitue une menace  pour notre démocratie. En individualisant les  parcours et les formations, il   empêche   les   salariés   de   demain    d’acquérir  des qualifications communes et contribue à les isoler face au patronat. En soumettant les élèves et leurs familles à la concurrence et à la sélection de plus en plus précoce (pour accéder aux « bons » établissements,   à la bonne   formation…),   il produit   épuisement   et souffrance et sacrifie les aspirations de la jeunesse.

Il nous faut un projet d’école en commun, une école capable d’accueillir et de faire progresser  tous les jeunes, ensemble, de leur transmettre une culture commune de haut niveau, pour leur donner les moyens de maîtriser les défis auxquels ils seront confrontés dans leur vie d’adulte. Ce n’est pas seulement une question de justice, c’est aussi une nécessité pour la   vie démocratique, dans  les institutions  comme dans l’entreprise. Comment  penser une nouvelle république, des droits nouveaux pour les travailleurs dans l’entreprise, sans   donner aux citoyennes et  aux citoyens de  demain  les  moyens  de comprendre un monde complexe et de le transformer ? C’est une urgence si nous voulons inventer des solutions nouvelles aux défis écologiques, économiques, sociaux et même anthropologiques auxquels nous avons à faire face. C’est aussi une nécessité pour qui veut transformer la société, nos modes de production et répondre aux enjeux sociaux et environnementaux de notre temps.

Pour toutes ces raisons, les personnels de l’Éducation nationale se mobilisent massivement depuis la rentrée de septembre et, le 2 avril, dans le cadre d’une très large intersyndicale, ils seront encore en lutte pour une école de qualité, ouverte à toutes et tous et qui défend une certaine idée de la république, qui a davantage le souci de l’intérêt général que des intérêts particuliers d’une minorité arrogante et méprisante.