Le mouvement qui a débuté le 5 décembre est désormais ancré dans la durée et continue de mobiliser de nombreux secteurs, notamment à Paris. Soutenus par la majorité de la population, notre détermination reste intacte car plus nous manifestons et faisons grève, plus nous obligeons Macron, son gouvernement et le Medef à dévoiler leur vrai projet.

Nous avons d’ores et déjà réussi à montrer qu’ils voulaient nous faire travailler plus longtemps, jusqu’à 65 voire 66 ans, comme l’atteste l’avis rendu par le Conseil d’État qui a confirmé le caractère truqué et tronqué des projections et des promesses de Macron et Cie. Nous sommes aussi parvenus à démontrer qu’en prenant l’ensemble de notre carrière dans le calcul, y compris donc nos pires années de chômage ou de précarité, cela ferait diminuer drastiquement nos pensions.

Et ce sont bien les femmes qui seront les grandes perdantes de ce mode de calcul, faisant de ce projet une contre-réforme sexiste, car nous sommes majoritaires à subir les temps partiels, les périodes d’interruption pour charges familiales et les bas salaires. Et calculer nos pensions sur l’ensemble de la carrière et non sur les six derniers mois pour le public ou sur les vingt-cinq meilleures années pour le privé, c’est aussi prendre en compte les plus mauvaises années de notre vie professionnelle. Ce n’est pas un hasard si le gouvernement a retiré de son étude d’impact les cas types de mères de familles qui faisaient état d’une baisse de droits importante pour les femmes.

Payées 26 % de moins que les hommes durant notre carrière, rien d’efficace n’est mis en place pour le contrôle et la résorption de ces inégalités. Nous sommes pourtant toutes et tous perdant·e·s puisque ce sont plus de six milliards de cotisations en moins pour nos caisses de retraites par répartition ! L’égalité, on a toutes et tous à y gagner.

Depuis plusieurs mois, les mobilisations mondiales contre les violences sexistes, rendues visibles tant par des vidéos virales que par d’énormes manifestations comme le 23 novembre avec #NousToutes, sont porteuses de résistances.

Les femmes sont justement motrices des grèves et des manifestations, notamment les enseignantes, les agentes des ministères et des services publics, de la RATP, de la SNCF, de l’énergie, ou les danseuses de l’Opéra. Mais il faut maintenant convaincre les salariées du privé, des commerces, des services, des banques, du bâtiment pour que l’on soit toutes et tous gagnant·e·s. La lutte des femmes de chambre de l’hôtel Ibis Batignolles indique que même là ou l’exploitation de genre, d’origine et de classe est violente, la solidarité et la soif de victoire permettent la mobilisation.

Le mouvement doit retrouver du souffle pour être en capacité d’emporter le retrait. Cela signifie la poursuite ou la reprise de la mobilisation dans les secteurs qui ont fait grève en décembre et janvier mais aussi l’entrée en lutte de nouveaux secteurs. Et il est possible de rassembler, car la colère est partout : dans les professions de la santé pour défendre les hôpitaux, dans la jeunesse qui s’inquiète pour son avenir et qui malgré le recours aux forces de l’ordre pour libérer les établissements bloqués ou perturbés reste déterminée.

C’est la question sociale, de classe, qui s’impose le 8 mars, journée internationale de lutte pour les droits des femmes. Pour toutes et tous, pour gagner, construisons avant, pendant et après une mobilisation de masse, sur nos salaires et pour nos retraites, en élargissant aux secteurs les moins mobilisés. C’est la seule condition pour gagner. Leur 49-3 n’arrêtera pas la contamination des mobilisations. Et l’énorme grève unitaire en préparation du 31 mars les fera encore reculer.

Aude Charcosset