Pendant cette crise sanitaire du coronavirus, des métiers peu visibles ou dévalorisés sont sortis de l’ombre. Cette mise à jour conduit la quasi-totalité de la population à partager la considération que la CGT a toujours eue envers ces métiers.

Éloigné du néolibéralisme ambiant et des idées dominantes qu’il véhicule, notre syndicalisme est constamment resté fidèle à une conception de l’économie fondée sur la réponse à tous les besoins de la population. C’est pour cela que la CGT sait analyser la situation concrète. Nous admettons une différenciation des activités en fonction de l’urgence sanitaire : celles qui doivent s’exercer sur le lieu de travail habituel, celles qui sont exercées en télétravail, celles qui sont suspendues. Nous faisons preuve de rigueur dans l’application des recommandations qui diminuent la diffusion virale. Nous nous adaptons à cette nouvelle donne tout en continuant notre mission de défense des intérêts des salarié·e·s, quelle que soit leur situation.

Nous observons que le patronat continue de privilégier le profit et poursuit sa stratégie de division des travailleur·se·s. Le profit ? Oui, en imposant au secteur du BTP de poursuivre ses activités, en mettant en danger celles et ceux qui assurent le nettoyage, la logistique, le commerce alimentaire, les transports publics… La division, oui, en ne versant des primes qu’à certains, en faisant plus que jamais des intérimaires de la chair à patron.

Le gouvernement et le chef de l’État ont dû retrouver un certain sens de l’intérêt commun, étant donnée la force majeure qui s’est imposée. La parole politique du pouvoir macroniste a pendant un temps emprunté à des thèmes plutôt cégétistes : nationalisation, relocalisation, dépenses publiques pour amortir la crise, mise à l’index des entreprises qui trompent le fisc via les paradis fiscaux. Notre monde, celui du travail, a marqué des points.

Mais le naturel semble revenir au galop puisque le pouvoir a donné des gages au patronat en ne nationalisant pas Air France, en refusant la réouverture des usines utiles au système de santé, en laissant tranquilles les fraudeurs fiscaux en col blanc. Sur le dossier Amazon, il a fallu l’intervention syndicale, celle de l’inspection du travail et la décision d’un juge pour stopper la mise en danger de salarié·e·s. Quant à l’État-employeur, il s’illustre tristement en ne protégeant pas suffisamment les professionnels de santé et en surexposant les policiers.

Les gouvernements successifs portent la lourde responsabilité d’avoir affaibli le système sanitaire français, les priorités ayant été la baisse des dépenses publiques et la tertiarisation au détriment de l’industrie. Gouverner, c’est prévoir. Chaque année peut survenir une catastrophe naturelle, un accident industriel, une canicule, une pandémie, etc. Non seulement il faut tout faire pour prévenir ces phénomènes, mais il faut être prêt à les affronter lorsqu’ils surviennent. Les responsables d’une telle débâcle sanitaire ne sauraient être exonérés de leurs responsabilités. Nous ne l’oublierons pas, d’autant qu’un gouvernement qui ne contrôle pas la situation est tenté de contrôler les citoyen·ne·s. Le « jour d’après » pourrait n’être ni aseptisé, ni liberticide, ni brutal. Il pourrait être solidaire et égalitaire. Mais, comme disait Einstein, on ne résout pas un problème avec les modes de pensée qui l’ont engendré.

Benoît Martin