La liste des revendications qui figurent dans l’appel intersyndical à manifester le 5 octobre est longue : elle met un nom sur tout ce qui fonde la colère contre la politique libérale-autoritaire qui est la marque d’Emmanuel Macron.

Augmenter les salaires, les pensions de retraite, préserver l’assurance chômage, garantir l’emploi, combattre la précarité des jeunes, mettre en œuvre l’égalité professionnelle, conditionner les aides publiques, arrêter le démantèlement et rétablir un service public de qualité, préserver et reconquérir les droits et les libertés attaqués depuis de nombreuses années… C’est en nommant ces revendications que nous pourrons remettre le train de la contestation sociale dans le sens de la marche.

On est loin de la confusion qui sévit dans les manifestations « du samedi » qui ont débuté en juillet : aux côtés de citoyens et de militants porteurs d’exigences sociales, défilent en nombre des complotistes, des antivax, la droite extrême et l’extrême droite, et l’on y voit fleurir des propos et des slogans nauséabonds, voire antisémites.

La question, pourtant, n’est pas tant de choisir avec qui l’on défile mais pourquoi et sous quelle bannière. Elle n’est pas non plus de savoir si l’on doit être présent « là où ça bouge ». Ça a bougé en masse le 30 mai 1968 pour soutenir de Gaulle, pour « l’école libre » en 1984, ou pour « la Manif’ pour tous » en 2013. Or il ne nous serait pas venu à l’esprit d’appeler à y participer « pour ne pas laisser la rue à la droite ou à l’extrême droite ».

Bien sûr, comme celui des « gilets jaunes » au départ, le mouvement en cours est plus difficile à caractériser. Mais, à l’inverse de ces derniers, qui ont très vite mis en avant des revendications sociales et démocratiques, les « manifs du samedi » sont nettement dominées par la droite extrême et l’extrême droite. Ce n’est bien sûr par leur composition exclusive : nous avons des camarades dans ces manifestations. Mais le « tous ensemble » en cours se fait autour d’une importante confusion.

Nous combattons le président de la République et sa politique depuis qu’il est apparu dans le paysage politique, lorsqu’il était encore ministre de François Hollande. Dès 2014, les salariés du commerce de Paris défilaient avec la CGT et l’intersyndicale du commerce en scandant « non à la loi Macron ! ». Pour autant, le slogan « anti-Macron » est non seulement insuffisant mais dangereux puisqu’il rassemble largement, majoritairement sans doute, dans les milieux de la droite et de l’extrême droite.

Peut-être est-il dommage que la date du 5 octobre soit éloignée au regard de la montée de la colère dans le pays ou que les mots d’ordre ne pointent pas les mesures discriminatoires du passe sanitaire mis en place de manière autoritaire par le président de la République. Mais les revendications de l’appel intersyndical ont le mérite de remettre les vraies questions au centre de notre action. Nous devons tout faire pour la réussite de cette première étape d’un combat qui sera long.

Depuis la lutte contre la « réforme » des retraites de 2003, nous avons subi de nombreuses défaites ; pourtant, notre combativité est toujours là, plus grande encore sans doute. Et nous la retrouvons très largement partagée dans la population. À nous de la mettre au service de revendications de progrès social, d’égalité et de démocratie. À nous de ne pas laisser la droite et l’extrême droite exploiter cette colère au bénéfice d’une politique inégalitaire, antisociale, réactionnaire, xénophobe, raciste et autoritaire.

La meilleure manière d’y parvenir, c’est de faire grève et de défiler pour nos revendications.

Karl Ghazi, UD de Paris