Ces dernières années, le 8 mars, la Journée internationale pour les droits des femmes, a connu des manifestations d’ampleur, avec une participation de plus en plus importante. Plusieurs syndicats, en particulier la CGT, la FSU et Solidaires, ont par ailleurs appelé à la grève pour l’occasion. Mais depuis, cette grève est restée principalement incantatoire. Pourtant, les revendications sont nombreuses. La CGT a d’ailleurs développé un corpus revendicatif important sur ce sujet, qui est de plus en plus reconnu par les travailleuses comme un outil féministe pertinent. Mais la grève reste difficile à construire.

Si la grève du 8 mars tarde à s’ancrer sur les lieux de travail, c’est que le problème réside ailleurs, notamment dans notre présence sur le lieu de travail et notre capacité à organiser les salarié·es. Pour le moment, à quelques exceptions notables près, nous avons eu du mal à lier les revendications générales (égalité salariale, retraite, pénibilité…) avec la réalité du quotidien sur le lieu de travail. Alors, pour préparer le 8 mars 2025, l’UD de Paris et le collectif Femmes-mixité ont décidé de reprendre les choses à l’endroit, c’est-à-dire en partant des lieux de travail. Nous avons mis sur pied le 6 janvier une Journée d’études intitulée « Construire la grève du 8 mars », qui fut une première à l’UD. Lors de cette journée, nous avons réuni des syndicalistes issues (et pour quelques-uns issus !) de trois secteurs largement féminisés du salariat, et qui travaillent le samedi. En effet, il ne fallait pas oublier que cette année, le 8 mars est un samedi.

Réunir des syndiqué·es et militant·es de différents secteurs

Étaient présents le commerce, la culture et l’action sociale. Avec quarante stagiaires, nous avons donc passé toute une journée ensemble. La matinée était consacrée à la construction revendicative. Une présentation des revendications féministes de la CGT a été réalisée par Myriam Lebkiri, membre du bureau confédéral en charge de la commission Femmes-mixité. Inégalités salariales, santé des femmes, violences faites aux femmes au travail… les principaux sujets ont été abordés. À la suite de cette présentation générale, nous avons accueilli nos camarades de la CGT BNF. Elles nous ont présenté la campagne qu’elles ont menés en 2024 pour obtenir un congé hormonal pour les femmes. Elles ont décrit la manière dont elles ont réuni leurs collègues pour entendre leurs besoins et construire ensemble les revendications à porter à la direction, les Assemblées générales qu’elles ont organisées, et enfin leur débrayage du 8 mars 2024, le rassemblement devant la BNF, et la manière donc cela leur a permis d’élever le rapport de force.

Gagner des droits pour toutes… et tous

En fin de matinée, nous avons échangé, avec les camarades de chaque entreprise, pour qu’elles choisissent un grand axe de revendication pour cette année. Plusieurs ont été inspirées par la présentation de la CGT BNF et ont choisi des sujets en lien avec la santé. La question de la reconnaissance de la pénibilité des métiers du soin et du lien a aussi intéressé les camarades concernées. Et d’autres ont décidé de mettre sérieusement en avant le problème des écarts de salaires. L’après-midi était ensuite consacrée à la construction de la campagne. Comment aller à la rencontre des collègues pour construire avec elles les revendications ? Comment leur proposer tel ou tel mode d’action en lien avec le 8 mars ? Quand organiser une assemblée générale pour décider de la grève ou du débrayage ? Comment convaincre les hommes que gagner des droits pour les femmes, c’est aussi gagner des droits pour les hommes ? Comment mettre toutes les chances de notre côté afin que la grève soit suivie ? Comment médiatiser notre action ? Comment s’appuyer sur les structures de la CGT, les UL, l’UD, les fédérations, etc. ? Comment coordonner nos actions afin que nos grèves du 8 mars soient visibles, sonores, médiatiques et qu’elles nous permettent non pas uniquement de témoigner mais surtout d’élever le rapport de force pour gagner sur nos revendications ?

C’est ça, mettre la grève et l’affrontement de classe au cœur du 8 mars : prendre le meilleur des deux mondes, le féminisme et le syndicalisme. Aborder de front les problèmes posés aux femmes au travail à partir de nos réalités vécues, pour proposer des modes de mobilisation gagnants. Mettre le syndicalisme au service des droits des femmes, parce que c’est ce qu’il y a de plus juste à faire, mais aussi parce que c’est notre meilleur outil pour organiser largement les travailleuses et gagner de droits pour toutes… et tous !