Le 19e arrondissement de Paris a vu éclore une mobilisation unitaire impressionnante, qui s’étend et s’ancre de plus en plus. En cause, l’annonce par la direction de la Cramif (Caisse régionale d’assurance maladie d’Île-de-France) de la fermeture d’un grand nombre de spécialités du centre de santé de Stalingrad.
Pour ses usager·es, le centre de santé Stalingrad constitue une offre de soins variés, accessibles, de proximité, où l’on ne pratique pas de dépassements d’honoraires et qui accueille près de trente mille patient·es, pour plus de cent mille passages par an. Pour les salarié·es du centre, c’est bien entendu leur métier, et un lieu important où les analyses et tests qu’ils prescrivent peuvent être réalisés sur place. Enfin, pour les autres professionnels de santé de l’arrondissement, c’est un maillon essentiel de la chaîne du soin.
Pourtant, radiologie, ophtalmologie, kinésithérapie, dermatologie, endocrinologie, gastro-entérologie sont autant d’offres de soin auxquelles les habitant·es du 19e arrondissement et au-delà pourraient ne plus avoir accès dans les prochains mois.
Branle-bas de combat
En cause, un calcul budgétaire idiot. Le centre de santé ne serait pas à l’équilibre. Mais c’est un service public, et aucun centre de santé proposant autant de spécialités et ne pratiquant pas les dépassements d’honoraires n’est à l’équilibre budgétaire. Les tutelles abondent toujours. N’est-ce pas le principe même de l’assurance maladie que de permettre à toutes et tous de se soigner ?
En outre, cette menace de fermeture partielle intervient dans un contexte où l’accès de la population aux soins est de plus en plus difficile, d’autant que le 19e arrondissement est officiellement classé en zone sous-médicalisée. Plutôt que de démanteler partiellement le centre, il s’agirait au contraire de développer l’offre. La santé est un bien commun, pas une marchandise.
Face à cette catastrophe, branle-bas de combat ! Ce sont des patients eux-mêmes qui ont d’abord lancé une pétition. Puis les salarié·es du centre, soignant·es et administratif·ves, ont sonné l’alerte. L’intersyndicale de la Cramif s’est alors mise en marche. Tous les syndicats sont impliqués, avec, en fer de lance, la CGT, largement majoritaire dans cette structure. Et toutes et tous dans l’arrondissement s’impliquent : l’UL CGT du 19e, les autres syndicats, les associations, les partis politiques et leurs élu·es. Le maire lui-même est dorénavant dans la bataille. Des usager·es de plus en plus nombreux·ses rejoignent le mouvement, et on commence à en parler dans la presse nationale.
Un rassemblement devant la Cramif a d’abord regroupé trois cents personnes. Qui sont ensuite allées à la Cnam (Caisse nationale d’assurance maladie) pour montrer leur détermination à une entité qui est devenue par trop gestionnaire. Il faut au passage saluer less administratrices et administrateurs CGT de la Cnam comme de la Cramif, qui réalisent un formidable travail de défense des assurés sociaux.
Un centre de santé municipal par arrondissement
Enfin, au moment où ces lignes sont écrites se prépare une déambulation dans le quartier de Stalingrad pour aller à la rencontre des habitant·es et de faire grossir encore la mobilisation. Chacun·e sait que l’unité est la condition d’un rapport de force favorable, et que plus la lutte sera ancrée dans chaque foyer du quartier, plus elle aura de chances d’être victorieuse.
Plus encore, cette lutte pourrait bien devenir exemplaire, dans un contexte où les centres privés faisant des dépassements d’honoraires et réalisant parfois des fraudes à la Sécu poussent comme des champignons. Notre Sécurité sociale, elle, est basée sur la solidarité. Nous cotisons, alors nous décidons ! Et ce que nous décidons aujourd’hui à Paris 19e, c’est que nous voulons garder notre centre de santé, parce qu’il est utile, tout simplement. C’est une lutte pour la santé de toutes et de tous, pour la Sécu, et qui montre bien que la population n’accepte pas que des vautours démantèlent nos conquis sociaux. C’est une lutte qui permet aussi de populariser la revendication de l’USR Paris,- reprise par l’UD : un centre de santé municipal par arrondissement.
Alors que nous fêtons les 80 ans de la Sécurité sociale, la bataille ne fait que commencer.
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Ailleurs aussi…
La mobilisation des salarié·es avec leurs syndicats et le soutien d’élu·es et de collectifs locaux d’usager·es avaient permis, au début des années 2010, de sauver le centre de santé du Square de la Mutualité, dans le cinquième arrondissement, et la plus grande partie de ses offres de soin. La même issue positive semble se dessiner pour le centre de santé du Moulinet (treizième arrondissement) qui aura vu se développer une lutte similaire. Et une autre est en train de naître, cette fois dans le quatorzième arrondissement, pour sauver l’Institut mutualiste Montsouris (IMM), établissement d’excellence en secteur 1, qui se trouve en cessation de paiement. La section CGT mobilise et rencontre des usager·es déterminé·es à ne pas voir disparaître une telle qualité d’accueil et de soin.