Des livres qui se savourent, à lire sur la plage si vous y êtes encore ou dans votre fauteuil, comme autant de coups de cœur qu’on aimerait vous faire partager.
• Le Train des enfants, de Viola Ardone
Naples, 1946. Le Parti communiste italien propose pour les enfants des plus démunis un séjour de quelques mois dans une famille (communiste, bien entendu) du nord du pays. Tranche de vie et de vies racontée à travers le regard d’un enfant et avec ses mots. À partir de faits historiques. C’est drôle, émouvant et plein d’humanité, comme une comédie italienne. Un véritable petit bijou.
• La Sobriété gagnante,deBenjamin Brice
Ne serait-ce pas de la provocation de parler de sobriété quand la bataille pour le pouvoir d’achat est plus que jamais d’actualité ? Non, pas avec Benjamin Brice, qui sait distinguer consommation et surconsommation, production et surproduction, et qui distribue une foule d’informations et de renseignements permettant de mieux appréhender ce que serait une économie raisonnée et raisonnable. Et puis, on n’est pas obligé d’être d’accord sur tout. Un excellent outil pour débattre. À commander chez son libraire.
• Tristesse de la terre, d’Éric Vuillard
Chaque petit livre (mais petit chef-d’œuvre) d’Éric Vuillard a pour cadre une page d’histoire : l’état-major nazi, Nguyen Sinh Cung (le futur Hô Chi Minh) à Paris, une insurrection paysanne dans l’Allemagne du xvie siècle, la prise de la Bastille ou encore la colonisation du Congo, liste non exhaustive. Tristesse de la terre met en scène William Cody, dit Buffalo Bill, et Sitting Bull. Le génocide amérindien passé au scanner de l’écriture d’un grand auteur.
• Loin d’eux,de Laurent Mauvignier
Laurent Mauvignier, c’est de la littérature coup de poing. Des livres qu’on ne lâche pas. Et pratiquement tous ses romans ont eu un prix. Alors, pourquoi celui-ci ? Peut-être parce qu’il est court et que c’est mieux pour celles et ceux qui vont le découvrir. Peut-être aussi parce que c’est son premier (vous verrez qu’il a frappé fort d’entrée) et que cela vous donnera envie de lire les autres. Un drame familial, vu à travers le « regard » de plusieurs membres de la famille. Des monologues comme des sortes de témoignages que l’on ferait à des enquêteurs. Une réalité sociale très prégnante. Ce premier roman était un coup de maître. Si vous êtes séduit·es, continuez avec Des hommes, sur la guerre d’Algérie, ou encore Histoires de la nuit, où Laurent Mauvignier s’attaque au roman policier. Mais on pourrait les citer tous.
• Les Grandes Largeurs, d’Henri Calet
Pas de sélection de livres sans une évocation de Paris. La capitale, Henri Calet l’a arpentée, en long et en… large après y être né en 1904 au sein d’un foyer brinquebalant et assez misérable. Ce livre retrace ses déambulations d’enfant et de jeune homme dans un Paris populaire qui est son domaine ainsi que quelques incursions dans les quartiers huppés, le tout narré avec un regard plein de charme et d’humanité. Calet, comme un frère.
• Connemara, de Nicolas Mathieu
Nicolas Mathieu est sans doute l’écrivain qui décrit avec le plus d’acuité et de précision les classes populaires et moyennes (des pluriels justement à cause de la précision). Ses personnages ont souvent des vies guères passionnantes mais – magie de la littérature – Nicolas Mathieu les rend passionnants. Observation, analyse, gros travail (il ne publie que tous les trois ans environ), et le talent fait sans doute le reste. Même quand on lui demande son avis sur un événement politique ou social, l’analyse qu’il en fait en trois phrases seulement est la plus intelligente, la plus percutante, la plus juste qu’on puisse lire ou entendre. Un vrai bonheur. Et quand on lit Connemara, à cinquante pages de la fin, on ralentit la lecture pour que le plaisir dure un peu plus longtemps. Pourquoi ? Parce que, sans doute, on ne rencontre pas ou peu de personnages aussi vrais. Ici, c’étaient deux jeunes gens du même bled, dont les vies ont totalement bifurqué (lui y est resté, elle en est partie), se retrouvent fortuitement vingt ans après. Tout pourrait les rassembler, tout peut les séparer. Sociologie du terrain, sociologie de l’époque, sociologie des comportements, ce sont les matériaux invisibles de Nicolas Mathieu, qu’il transforme en littérature. Et si la lecture de Connemara vous a convaincu·es, lisez aussi Leurs enfants après eux, qui a reçu le prix Goncourt en 2018.