Les parlementaires ont confirmé l’ouverture à la concurrence du réseau de bus francilien de la RATP, quoi qu’il en coûte à la population, car l’éclatement et la privatisation du réseau de bus vont générer une mise à mal du droit universel à la mobilité. Le débat sur la proposition de loi relative à cette ouverture n’y a rien changé et n’aura abouti qu’à des ajustements de forme, alors qu’une modification de fond était nécessaire pour mettre fin au dumping social et à la soumission des Francilien·nes aux injonctions financières.

Le dogmatisme libéral de Valérie Pécresse et de l’ensemble des parlementaires libéraux qui la suivent est le seul moteur de sa volonté d’ouvrir à la concurrence le réseau de bus de la RATP. Pourtant, tout le monde sait que la mise en concurrence des opérateurs n’apportera aucune amélioration du service public de transport, tant en quantité qu’en qualité, car tout est dicté par le contrat qui lie chaque opérateur à l’autorité organisatrice. L’opérateur ne disposant que d’une marge de manœuvre très mince, dans la mesure où son rôle est d’assurer la mise en œuvre du contrat, la facture économique et sociale va donc être salée.

Une productivité qui tourne le dos au service public

À date, c’est ce même type de contrat qui lie Île-de-France Mobilités (autorité organisatrice) et la RATP et qui, dans sa maquette financière, impose une productivité annuelle de 36 millions d’euros sur la période 2021-2024. Cela se concrétise par la suppression de 458 postes. Dans un secteur où 70 % du prix de production est composé de la masse salariale, la recherche de profits pousse à faire baisser la facture en rognant sur les salaires, l’emploi et les conditions de travail. La preuve se vérifie par les différents conflits sociaux qui ont émergé suite à l’attribution des nouvelles délégations de service public sur la Grande Couronne.

Régression sociale à tous les étages

Qu’il s’agisse de Catherine Guillouard, lorsqu’elle était encore PDG de la RATP, ou de l’administrateur du réseau Optile, ces deux représentant·es d’acteurs majeurs du transport public de voyageurs en Île-de-France ont interpellé par courrier Valérie Pécresse sur les impacts de la dégradation du cadre social, et donc de l’attractivité des métiers, dans la perspective de l’ouverture à la concurrence, ainsi que sur la soutenabilité de la maquette financière des délégations de service public. Ainsi, à l’heure où la RATP communique sur un plan de recrutements « ambitieux » de machinistes-receveurs (conducteurs de bus) avec 2 400 embauches pour 2023, le dernier tableau de bord mensuel, à date du 30 septembre 2023, fait apparaître que sur les 1 188 sorties des effectifs, on en dénombre 826 pour démissions, révocations-licenciements pour faute grave (souvent abandon de poste) ou encore non-confirmation dans la premièreannée. En septembre 2021, il y avait 16 214 machinistes-receveurs. Aujourd’hui, ils ne sont plus que 14 493, soit 1 721 postes en moins.

Une autre voie est possible

Il n’y a rien d’inéluctable à la privatisation du service public, dans la mesure où le règlement OSP de 2007 précise que « l’obligation d’attribuer des contrats, par l’intermédiaire d’une procédure de mise en concurrence, ne s’applique toutefois pas […] si une autorité locale fournit des services de transport public elle-même ou les assigne à un opérateur interne de transport (un organe indépendant, que l’autorité locale contrôle comme s’il s’agissait d’un de ses départements) ». Pour Bertrand Hammache, secrétaire général de la CGT-RATP, « en s’entêtant à vouloir ouvrir à la concurrence et privatiser les transports franciliens, Valérie Pécresse remet en cause d’une part le droit universel à la mobilité de chaque Francilienne et Francilien et, d’autre part, elle maltraite les travailleur·ses RATP ».

Pour Vincent Gautheron,secrétaire et représentant CGT-RATP au CE, « la présidente d’IDFM fait un choix de société, celui de ne pas apporter de réponses concrètes aux enjeux sociaux, environnementaux et économiques auxquels est confrontée la première région de la métropole. À l’instar des secteurs publics libéralisés à date, elle enferme le secteur du transport public dans un financement public préempté par des groupes privés à la recherche de profits. »